« En tant que défenseure des droits humains, je pense que c’est un recul, il y’a trop d’attentes par rapport aux violations des droits humains pour que le Burkina supprime le ministère des droits humains et le rattache au ministère de la justice. Il y’a trop de dossiers pendants, il y’a des assassinats, des disparitions forcées, il y’a beaucoup de violation au quotidien et donc ce n’est pas le moment de supprimer le ministère des droits humains » Dixit Florence Ouattara coordonnatrice nationale de la coalition burkinabé des défenseurs des droits humains
« La défense des droits humains au Burkina Faso (BF) : l’engagement suffit-il pour relever les défis ? » est le thème retenu pour la campagne de renforcement de la protection des défenseurs des droits humains les plus vulnérables qui s’est tenue le mercredi 28 avril 2021 au sein de la Coalition burkinabé des défenseurs des droits humains (CBDDH) basée à Ouagadougou.
Cette rencontre, 3ème du genre, a permis de faire le point des activités par rapport à la protection des femmes défenseurs et des défenseurs vulnérables a expliqué Florence Ouattara. Elle a en outre indiqué qu’ils (la quinzaine de participants venus du Centre, du Sahel, du Nord et du Centre –Ouest) s’étaient penchés principalement sur les défis auxquels ils sont confrontés à travers des partages d’expériences, de bonnes pratiques et aussi les travaux de groupes qui ont permis aux participants de recenser ces défis qui ont été consignés par écrit suivis de restitution, de propositions, de suggestions et de recommandations par rapport à la thématique « et pour cela, je voulais remercier tous les participants surtout pour leur engagement ».
En ce qui concerne les défis, Florence a souligné qu’ils étaient très nombreux surtout dans le contexte du BF ou on assiste à la crise sanitaire et sécuritaire malgré le durcissement des textes et lois, ce qui rend très difficile le travail des défenseurs sur le terrain « Quand on parle de défenseurs, ce sont des syndicalistes, des journalistes , des défenseurs au niveau des élections, au niveau de la gouvernance qui sont obligés de continuer le combat, qui sont obligés malgré le durcissement des textes , les difficultés liées aux deux crises, d’exister, de pousser et d’aller de l’avant et de réussir la résilience malgré tout et c’est ça qu’il faut saluer. Au niveau du BF, les défenseurs sont des partisans ».
Se prononçant sur la suppression du ministère des droits humains ; Florence a trouvé que cette idée de la part du Gouvernement, n’était pas la bonne ni la bienvenue.
Celle qui se dit défenseure des droits humains, pense que c’est un recul puisqu’il y’a trop d’attentes par rapport aux violations des droits humains et vue ces nombreuses attentes, le Burkina ne devait pas supprimer le ministère des droits humains pour le rattacher au ministère de la justice : « Il y’a trop de dossiers pendants , il y’a des assassinats, des disparitions fortuites, il y’a beaucoup de violation au quotidien et donc ce n’est pas le moment de supprimer le ministère des droits humains . Autant les populations attendent des réparations, autant des individus, des citoyens lambda attendent des réparations et nous attendons que la justice se prononce. Ce n’est pas à ce moment propice de grandes attentes que le gouvernement devrait supprimer ce ministère ».
C’est pour cela, profitant de l’occasion qui lui était offerte, elle a lancé un cri de cœur à l’endroit de la CNDH qui est leur Faitière nationale à vraiment s’outiller et à prendre les devants pour aller au large et trouver des solutions en matière de violation des droits humains, puisque le Burkina a beaucoup à faire .
Sékou Sérémé, président de l’association « Vie sauvée par le sang au Sahel », abondant dans le même sens que Florence, pense qu’il était inopportun de supprimer le ministère des droits humains : « Je pleure aujourd’hui parce que le ministère qui a à défendre les droits humains a été englouti, avalé par celui de la justice. Le ministère des droits humains avait sa place en ce sens qu’il formait les populations à prendre conscience à travers les formations et les renforcements de capacités. Les populations étaient renforcées puisqu’elles connaissaient les textes et instruments juridiques et cette connaissance leur permettait de bien se comporter. Et ce ministère avait un rôle de prévention ».
Quelques participants se prononcent par rapport aux défis à relever.
Que tu sois au Centre, au Nord, au Centre –Ouest ou au Sahel, la plupart des défis à relever son énormes et se retrouvent surtout sur les plans sanitaire et sécuritaire. En plus de ces défis, il faut ajouter le manque de formation, de renforcement de capacités, de cohésion sociale (qui s’effrite de jour en jour) et surtout le problème de leadership et d’alternance.
La question sécuritaire selon Sékou Sérémé, président de l’association « Vie sauvée par le sang au Sahel » est un défi énorme à relever. En effet, il a remarqué que les assassinats sont nombreux et il ne se passe pas un jour au Sahel qu’on assiste à des tueries sauvages et orchestrées et il s’est posé la question de savoir si ce sont des règlements de compte ou pas « On ne sait pas ce qui est recherché par cette crise sécuritaire et c’est de façon quotidienne qu’on assiste à des tueries ».
Cette crise sécuritaire fait qu’on est obligé de limiter ses déplacements a ajouté Valerie Zengué, présidente de l’association des femmes handicapées dénommée ( femmes battantes ) « Le terrorisme est partout et il y’a des espaces auxquels les femmes ne peuvent avoir accès du à l’insécurité , ce qui fait qu’on est obligé de limiter nos déplacements ».
En ce qui concerne le coté sanitaire, Valerie reconnait que le gouvernement fournit beaucoup d’efforts. Cependant, il lui reste beaucoup à faire, a-t-elle lâché « Notre souhait est que le gouvernement dote les 13 régions de rame d’accès au niveau de l’accouchement car les tables d’accouchement ne sont pas adaptées et les agents de santé aussi ne sont pas formés pour recevoir les personnes atteintes de handicap ».
Elle a en outre émis le vœu que les immeubles de la place qui sont dotés d’ascenseurs soient aussi accessibles aux personnes atteintes de handicap « Souvent, quand tu vas dans un ministère ou dans une institution, on t’interdit d’emprunter l’ascenseur soit disant que c’est réservé au ministre ou au 1er responsable ».
Entre autres défis et non négligeables, ce sont les problèmes de cohésion sociale, de leadership, d’alternance (certaines personnes, une fois aux commandes, ne veulent plus donner la chance aux autres, elles veulent s’éterniser ce qui fait qu’il y’a des frustrations et des départs) et aussi le manque de ressources « seule la CNDH nous soutient et on utilise nos fonds propres (cotisations des membres) pour mener nos activités ont-ils dit ».
Yssouf Nézien, membre de l’association sportive et culturelle pour l’enfance basée à Koudougou et qui milite pour les droits des enfants , des mineurs de 4 à 18ans, dont l’association a pour objectif de faire en sorte que l’enfant puisse s’épanouir tout comme les autres, rencontre les mêmes défis à relever « nous avons des défis à relever, des gens n’arrivent pas à comprendre ce que c’est que le droit à l’enfant ; l’enfant a certains droits que nous négligeons et à cela , il faut vraiment une sensibilisation à l’endroit des parents afin que ces derniers puissent comprendre le droit fondé des enfants , au sein des associations. Il faut également une cohésion, une formation de base à tout membre qui milite dans les associations pour qu’on puisse ensemble main dans la main gagner le pari »
Il y’a des défis entrant dans le domaine des droits humains et vous savez que ce domaine est très délicat. Au BF, quand tu luttes pour les droits d’une minorité, ce n’est pas du tout facile a conclu tristement Valérie.
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