Artiste plasticien, responsable d’une association d’art plastique (qui a révélé beaucoup d’artistes sur le plan national qu’international), Français, critique d’art, commissaire d’exposition (d’expo), perfectionniste et très exigent (selon ses dires), Pierre Garel qui a vécu pendant 23ans au Burkina Faso, décide de rentrer chez lui pour des raisons personnelles et familiales.
« Il est Français, c’est vrai ; cependant, l’art n’a pas de nationalité , l’art n’a pas de frontière ; vue le combat qu’il a mené avec les artistes, nous nous sommes dits qu’il était important de l’accompagner avec cette dernière exposition collective pour lui témoigner notre amitié, pour lui témoigner notre reconnaissance envers lui , envers tous les projets artistiques qu’il a eu à piloter pour le bonheur des arts plastiques, d’où la tenue de ce vernissage ce jour samedi 8 avril 2023 à la galerie Kanudya. Comme je l’ai dit, il est Burkinabé, son épouse est Burkinabé, il repart avec trois merveilleux enfants Burkinabés. Il est chez lui, nous espérons avec les qualités qu’il a en tant que plasticien, en tant que critique d’art, en tant que commissaire d’expo, qu’il reviendra avec nous autour de projets », a confié Mariam Sougué, propriétaire de la galerie Kanudya.
Le thème de cette expo est « Dernier chapitre dans la poussière ». Le choix d’un tel thème résulte du fait que nous sommes dans un pays du Sahel et qui dit Sahel, parle de poussière a expliqué Mariam « Nous sommes au quotidien dans la poussière. Il quitte la poussière pour un autre climat. Egalement poussière, pour dire stop à ces personnes surtout vulnérables qui sont là, ces déplacés de guerre qui sont là. Pour nous, c’est marquer un dernier chapitre de cette tempête ; nous croyons fortement que des jours meilleurs viendront, ceci est une fin pour une chose, mais également le début d’une très belle histoire ».
L’expo « Le dernier chapitre dans la poussière » ; l’idée, c’est de tourner un chapitre, on ouvre un livre, on écrit, on écrit encore a souligné Pierre « Les artistes ont envie de travailler jusqu’à leur dernier souffle, continuer à avoir des relations avec un certain nombre de gens et de structures ici.
La 1ère chose qui me vient à l’esprit, c’est la continuité de l’activisme des artistes ici et j’ai eu le plaisir d’y participer et j’ai vraiment à cœur que ça puisse continuer dans le meilleur dynamisme possible, que les artistes soient reconnus, toujours des choses à dire, qu’ils aient envie à continuer de se cultiver.
Ce sont des artistes qui sont de plus en plus autonomes, très diversifiés, chacun peaufine sa démarche . Moi, je les souhaite de continuer dans cette voie, ce qui me tient à cœur, c’est de pouvoir avoir des réseaux culturels sud-sud, qu’on ne soit pas toujours dépendants de l’Occident au niveau des acheteurs, des galeristes, que le Burkinabé puisse se connaitre dans les pays d’Afrique émergents, très actifs au niveau des arts ; je souhaite qu’il y’ait plus de liens, plus de galeristes, d’Afrique du Sud, du Nigéria, du Kenya , du Sénégal. Ça fait partie en sorte de mon combat, proposer aux artistes des sessions ces projets avec ou sans eux dans les pays limitrophes. Cela nous a permis de travailler au Benin, au Togo, en Haiti, en Côte d’Ivoire ».
Pierre s’est senti en outre heureux d’entendre finalement qu’il a joué un rôle pour avoir une certaine importance « j’ai posé ma pierre et les gens sont reconnaissants ; ça permet de dépasser les quelques peut-être incompréhensions des uns des autres. On a pas la même culture, on ne voit pas l’art de la même manière, mais finalement, on se serre les coudes et malgré nos différences, je trouve que c’est bien, en même temps, ce qui est bien dans un hommage, c’est de ne pas enterrer la personne ».
Pour ce qui est de la situation sécuritaire du pays, Pierre s’est prononcé là-dessus « Je me suis rendu compte que les Burkinabés veulent reconstruire leur histoire récente et future, en tant qu’artiste dans le milieu, je me suis dit qu’il y’avait quelque chose à faire par rapport à cette histoire à construire au BF, à lutter contre le terrorisme et contre tous ces problèmes énormes qui sont là actuellement. Je pense que je dois faire profil bas, je pense que l’Occident doit faire profil bas, je pense que les Burkinabés doivent se prendre en main en acceptant l’aide de telle ou telle nation et Africain aussi et je crois que je n’oserai pas participer à cette histoire parce que je n’ai pas de mot à dire ».
Ce sont au total 25 artistes de toutes disciplines confondues, chacun en sa manière à travers leurs œuvres qui ont voulu témoigner leur gratitude à l’endroit de Pierre et des artistes se sont confiés en expliquant leurs œuvres. Le public a aussi eu le plaisir de découvrir quatre performances de Fleur Biguibouré, Pierre Garel, Lolito et de Silvia Ferraris.
La pièce d’Abou Sidibé, sculpteur burkinabé a pour titre « Wakat » qui signifie le temps, l’impact du temps sur nous « Nous sommes forcement marqués par le temps. Le temps nous soigne, nous blesse, nous guérit. Au fil des temps, on est complètement aguerri. Notre pays traverse une situation très compliquée, mais ça passera ; ça sera un mauvais souvenir pour nous parce que je pense que depuis la nuit des temps, dans l’histoire de l’humanité, les grandes nations sont toujours passés par des moments de chao, mais, cela nous fortifiera et nous sortirons grandis de cette épreuve.
C’est vrai que c’est de la récupération, j’utilise beaucoup le bois et au bois viennent s’agripper d’autres matériaux que sont la pierre, le fer, le bronze, toute une accumulation de matériels ».
L’œuvre de Talato Agnès Tebbda parle de la Liberté en général « Je pense que pour vivre ou pour exister, même pour s’exprimer, on a besoin de liberté, c’est comme si je suis libre, donc, je m’exprime à ma façon sur ma toile. Cependant, je pense qu’en général, on a besoin de la liberté pour se faire comprendre, pour exister, pour échanger avec les autres ; vue que Pierre a beaucoup travaillé avec beaucoup d’artistes, il choisit aujourd’hui pour qu’on l’accompagne à lui dire au revoir et on est plusieurs à le joindre ».
La toile de Silvia Ferraris évoque le noir « C’est dans les moments sombres qu’on craque ; et lorsqu’on craque, surgit l’Espoir, les graines de l’espoir et l’espoir nait. Il y’a des touches de lumière dans les cheveux, certains angles de la main. Cela résume beaucoup l’esprit du BF c’est-à-dire qu’il y’a cet Espoir dans les situations que les personnes peuvent supporter, il y’a cet Espoir au fond, on a la capacité de tout transformer ».
Pierre Garel a reçu beaucoup de cadeaux de ses paires.