
Teinturier depuis plus de 25ans (son grand-père fut un grand teinturier traditionnel au village et c’est ce dernier qui lui a initié ce métier selon ses dires), passionné d’arts traditionnels, artiste peintre, spécialiste en teinture et en indigo, président de l’association Baobab Ramsa, Abdoulaye Bondé, depuis plus de quatre ans (en 2021), a décidé d’outiller les enfants de son quartier (Pissy) aux métiers traditionnels en voie de disparition à travers des séances de formations.
Pendant 45jours (pour environ sept séances), ces enfants ont pu se familiariser au bogolan, au djembé, au balafon et au tissage a expliqué Abdoulaye « Cette année, nous avons formé 72enfants qui voulaient toucher à tous les corps de métiers. Malheureusement, compte-tenu de la limite de nos moyens, ils n’ont pu s’essayer qu’aux métiers suscités ».
La cérémonie de clôture a eu lieu le dimanche 09 février 2025.

Cette activité résulte du fait que Abdoulaye aime partager ses connaissances aux autres et aussi les métiers dits traditionnels sont en train de disparaître et pour éviter que cela n’arrive, il a invité les uns et les autres à perpétuer leur savoir à qui veut, d’où la formation, a-t-il noté « C’est à partir de 2021 que nous avons créé Vacances Art pour initier aux enfants des métiers dits traditionnels qui sont en train de se perdre au fur et à mesure. On entend par métiers traditionnels :La confection de musiques traditionnelles, la teinture et le bogolan faits naturellement à base de produits naturels c’est-à-dire avec les feuilles de ziga, l’écorce de résinier, la cendre jetée du bois et l’argile ; ce sont tous ces corps de métiers que nous avons réunis pour essayer de transmettre aux enfants. Nous nous sommes dits qu’en formant ces enfants si deux ou trois enfants se l’approprient, nous sommes sûrs qu’il y’aura de la relève.
Notre objectif, c’est de permettre aux enfants de découvrir ce que nos grands-parents faisaient comme la teinture, le tissage, la mode (nous faisons aussi de la couture ; côté musique, pareil puisque beaucoup de gens jouent le djembé mais ignorent sa fabrication
Ici, on apprend aux enfants comment fabriquer un instrument de musique comme le djembé, le balafon, l’ingonie, le tamas… ».

L’association n’a jamais reçu de subvention de l’État et travaille avec ses propres moyens.
Abdoulaye a confié n’avoir jamais reçu une subvention de l’État ou d’une ONG (organisation non gouvernementale) et a insisté sur le fait que depuis 2018, l’association qui compte plus de 37membres (à l’atelier, on a 11 tisserands plus Abdoulaye qui fait le bogolan, tous les autres sont un peu dispersés dans la ville de Ouagadougou) travaille avec ses propres moyens. « Nous avons des amis qui nous soutiennent un peu. Avec les enfants, une amie nous vient souvent en aide avec 60 ou 80Euro qui nous permet d’acheter au moins un sac de riz et si d’autres en faisaient aussi, on pouvait avoir au moins deux ou trois sacs de riz et cela nous permettrait de préparer à manger aux enfants. Cette année, nous avons organisé avec les fonds de l’association »

Des difficultés, l’association en rencontre.
« Nous recevons tous les enfants et c’est de bouche à oreille que nous arrivons à réunir un grand nombre et comme les enfants s’y plaisent, les parents au quartier veulent toujours savoir la date de la prochaine édition et l’inscription est gratuite. Nous avons voulu fixer la somme de 2000Fcfa à l’inscription pour chaque enfant afin de pouvoir prendre en charge la nourriture ; nous ne l’avons pas fait.
Ce qui nous écœure le plus, on a remarqué que les parents, une fois qu’ils ont inscrit leurs enfants, ne s’intéressent plus au reste : Tous les parents devaient être présents, malheureusement, vous constatez vous -même que peu sont là puisqu’ils ne connaissent pas l’importance de l’art ; c’est pourquoi nous luttons afin que les enfants puissent découvrir l’art de notre identité culturelle pour éviter que nous la perdions du moment que certains l’ont déjà perdu et ne s’y intéressent pas ».
À l’endroit des décideurs politiques, Abdoulaye leur a lancé un cri de cœur.
Pour Abdoulaye, beaucoup de choses manquent au niveau de la culture et le ministère doit accompagner les acteurs culturels qui sont déterminés et qui font rayonner la culture sur tous les plans « En réalité, une personne qui met pied ici, se rend immédiatement compte qu’il y’a du travail qui se fait. Malheureusement, nous remarquons qu’il y’a des associations qui n’ont pas de siège mais qui reçoivent des subventions de l’Etat et nous jamais. Nous n’avons jamais eu de subvention de l’État. C’est pourquoi j’appelle haut et fort le ministère de la culture à s’intéresser vraiment aux associations qui travaillent pour le rayonnement de la culture burkinabé. Celui qui travaille pour le bien-être de la population, doit être soutenu.
J’ignore la politique du ministère. Nous invitons le ministre à s’imprégner des réalités en sortant sur le terrain pour constater de visu ce qui se passe. Une association qui existe légalement sur papier, doit avoir un siège et pouvoir montrer réellement et concrètement ce qu’elle fait et éviter de subventionner des papiers qui n’existent pas sur le terrain. Mon appel c’est d’œuvrer à ce que ceux qui travaillent honnêtement pour aider la jeunesse, la population, le pays soient accompagnés et soutenus ».
Des acteurs culturels se sont prononcés.
Tout comme Abdoulaye, Pauline Gondé/Tiendrébéogo, trésorière de l’association Baobab Ramsa est revenue sur les nombreuses difficultés auxquelles est confrontée l’association « Nous rencontrons beaucoup de difficultés : c’est difficile de travailler en groupe surtout que les besoins diffèrent d’une personne à une autre. Cependant, comme nous avons décidé de se mettre ensemble pour travailler, nous faisons de notre mieux pour que l’association ne tombe pas.
Lorsque tu exerces seul un travail, ce n’est pas toujours évident, c’est pour cela que j’ai jugé nécessaire de m’associer aux autres pour avoir plusieurs avis différents et ensemble, on devient fort et le travail avance et si tu dois postuler pour une aide ou pour une convention, c’est mieux d’aller en association.
L’autre difficulté et pas des moindres, est que nous n’avons aucune aide. Nous frappons à toutes les portes : Nous avons déposé une demande d’aide à notre ministère et cela est resté sans suite. Du ministère, on nous dit d’aller au gouvernorat, et rien n’est fait. C’est avec nos propres moyens que nous avons pu relever ce challenge, si non que dans notre programme, on devait faire plus. Nous aimons ce que nous faisons, malheureusement limités par les moyens ».
Honoré Bazié, Coordonnateur de la thématique « culture de l’arrondissement 3 » a constaté amèrement que les acteurs culturels ne s’entraident pas « Quand on parle de la culture entre acteurs culturels, on ne s’entraide pas. Pourtant dans la culture, il y’a un adage qui dit que même si on t’oublie, il ne faut jamais t’oublier. C’est à nous acteurs culturels de nous venir en aide ; c’est la raison pour laquelle je suis là aujourd’hui pour soutenir le Baobab Ramsa pour l’initiative qu’ils ont crue en se décidant de léguer ce travail artisanal à nos enfants.
Ce qui m’a plu en eux, c’est qu’ils font de la récupération à base de nos linges sales abandonnés, des sachets pour la transformation, pour redonner vie (des tapis, des sacs, des tableaux de décoration, toute personne qui est curieuse, doit connaitre l’adresse et passer voir ce qu’ils font) ».
L’association est aussi écologiste.
Pour Honoré, ceux qui viendront s’imprégner de ce que Baobab fait, se rendront compte que ce sont des écologistes puisqu’ils font de la récupération pour transformer « et vous-même constatez le montage des djembés fait par les enfants, les balafons fabriqués, des tissages et des tableaux produits par les enfants et je demande aux Autorités de sortir et de voir de visu ce que font les acteurs culturels au lieu d’être cloitrés dans les bureaux, qu’ils mettent des agents sur le terrain qui vont tourner, changer , croiser les personnes qui se donnent à fond et qui ont cru à la génération future, qui ont cru en elle-même pour les accompagner .vous avez vu le cadre , c’est pour vous dire que c’est la volonté , on attend rien, c’est simplement faire plaisir aux enfants ».
Manuella Tiemtoré de la classe de 5ème du lycée de Zongo

, une des bénéficiaires s’est dite très satisfaite d’avoir eu la chance de se familiariser aux métiers dits traditionnels. Elle a profité de l’occasion qui lui était offerte remercier les initiateurs tout en leur souhaitant une très bonne chance en implorant la grâce divine sur eux.